DANS L'OMBRE & SOUS LES CARESSES ...
Je suis restée.
Silencieuse. Patiente.
Et j'ai supporté chaque moment de découragement, je les lui ai cachés, même s'il ne me regardait pas.
Un soir, il est revenu vers moi, sans un mot, sans une explication, un peu comme s'il réalisait ma présence. Je ne sais pas, en fait, ce qui s'est passé.
Retour maladroit, pour nous deux, je crois... C'était bon, c'était doux, mais sans la passion d'avant. Du plaisir teinté d'incompréhension, pour moi.
C'est un jeu trop dangereux. Ce n'est même pas un jeu, c'est juste dangereux. Trop extrême dans l'ignorance...
If It Be Your Will
That I speak no more
And my voice be still
As it was before
I will speak no more
~
Leonard Cohen ~
° * °
Là où va son désir...
A-t-il voulu me "punir", ou me faire souffrir ? Son désir de moi était-il réellement éteint ? Et son amour ? A-t-il réalisé ?
Pourquoi n'ai-je rien dit ? Parce que, sur la défensive, les réponses auraient sûrement été agressives, douloureuses. Parler serait la solution, mais nos sensibilités nous handicapent.
Est-il parti dans ces mondes virtuels pour en faire sa réalité sexuelle ? A-t-il désiré une autre femme ? S'est-il réfugié dans les plaisirs solitaires pour combler le manque de jouissance, voire de douceur ? Très certainement.
Beaucoup de questions. Très peu de réponses.
° * °
Là où va mon désir...
Plaisirs solitaires ? Je n'ai pas pu. J'en suis incapable, seule, quand mon couple va mal. Les rares tentatives n'ont fait que souligner la frustration, le manque de réalité, de corps masculin, d'odeurs mâles, de chaleur. Je voulais du vrai, je le voulais, lui.
Pourtant, pour la première fois depuis notre rencontre, j'ai regardé les hommes, les femmes, différemment. Etrange sensation, que j'ai du mal à m'expliquer clairement.
Concernant celui que j'aime, mon désir a oscillé, dans l'ambiguïté. Aucune envie de distractions charnelles, aucune envie d'orgasme, aucune envie de baiser, m'envoyer en l'air. Volupté en pause.
Désir de lui, pourtant. Aspiration à la sensualité, à la tendresse. Espoir de complicité, d'exaltation, de communion ou fusion.
En désirant son corps, je ne désirais pas le plaisir, mais notre amour. Je voulais lui parler sans ces foutus mots, lui dire mon amour par le toucher, par tous les pores de ma peau. Je voulais lui faire du bien. De la douceur, par dessus tout.
Je voulais qu'il me désire encore, me touche... et me rassure. Me fasse comprendre que tout n'était pas fini. Je ne voulais pas qu'il me fasse l'amour.
Mais ce besoin de contacts, d'attentions, de caresses, de tendresse, s'est reporté ailleurs, en quelques sortes, de manière maladroite et surtout inaboutie.
Comme la nécessité de me rappeler que je pouvais plaire, que je méritais de l'attention... Sûrement un besoin d'être touchée, pour me sentir vivre. Réagir sous des mains chaudes, masculines. Retrouver mon droit à désirer, même ailleurs, vu que celui qui partage ma vie cultive cette part de sa personnalité ? Retrouver mon droit à être désirée, même ailleurs, si lui ne sait pas en profiter ?
J'ai pris ce que j'avais sous les yeux. Du superficiel... au fond.
Un regard nouveau sur les hommes. On peut trouver en chacun d'eux un détail troublant, quelque chose de désirable, un regard déstabilisant, pour peu qu'on soit réceptive. Mais j'ai déshumanisé ces hommes. Je me suis attardée sur des parties infimes, j'ai rêvé en considérant des particularités, pas des êtres masculins dans leur tout.
Un cou, une nuque.
Des bras, des mains...
De beaux yeux.
Et lui, qui me parle ? Sa gentillesse, son regard qui dit que je lui plais. Juste ça.
Un autre ? Des mots, juste quelques écrits. Je ne le connais pas, je ne sais quasiment rien de lui, je ne sais pas son visage, ni son prénom. Tant pis...
Avec lui aussi je peux cultiver mon désir, j'ai l'impression d'être une femme.
Désir, mais désir abstrait, pour ne pas se sentir mourir doucement.
Toucher, être touchée. Au sens propre, au figuré...
Troublée, même, par une peau féminine, un dos, une marque de bronzage, une bretelle de robe qui tombe. Troublée par le grain de peau, la douceur supposée, quelques taches de rousseur sur une épaule. Troublée par un décolletté qui met en valeur l'arrondi d'un sein... séduction féminine subtile cette fois-là, opposée au vulgaire étalage.
° * °
Saisir les désirs simples des inconnus, pour garder la sensation de maitriser. Ne plus avoir cette impression que tout se dérobe, glisse entre mes mains. Comprendre le superficiel, mais être déroutée par celui qui connait presque tout de mes vraies aspirations, de mes penchants inavoués, de mes fantasmes inavouables.
Ne plus savoir, ses envies, ses émotions, ses pensées. Mon homme, mon compagnon... Mon mystère, mon inconnu. Cette incompréhension se révèle paradoxale, et elle fait un peu peur.
Ne plus savoir, mes envies ? Je n'aspire pas à m'échapper. Je refuse de désirer dans la facilité et les apparences.
Au final, fantasmer ailleurs voire désirer, ou même à l'extrême, séduire, semblent plus faciles, mais plus lâches aussi. Renoncer à se battre, et se rassurer temporairement avec du factice. Reconquérir est difficile, mais tellement plus lumineux, intense, valorisant, à mes yeux... Faire face, au lieu de fuir dans l'imaginaire.
Photo... Silhouette féminine. Autre main. Masculine ? Féminine ?
Tourner le dos au désir, aux plaisirs. Tenter d'ignorer, et pourtant chercher, accepter.
L'air de rien.
Des envies, mais dictées par la frustration... je ne pense pas que ça soit le meilleur des désirs.
Sensibilité, amour, voire naïveté, peut-être, de ma part ? A trop vouloir y croire ? Le temps le dira.
Je souhaiterais pourtant te voir bafouiller de joie...
C'est une approche toute différente de l'écriture. Les mots ne sont pas les mêmes, l'ambiance s'en ressent.
Beaucoup de tristesse, oui. Moins de colère.
Mais j'ai l'envie de retourner vers quelque chose de plus érotique...
Turned away on your side?
Is my timing that flawed,
Our respect run so dry?
Yet there's still this appeal
That weve kept through our lives
Love, love will tear us apart again..."
Une autre langue, mais les mêmes émotions...
Quand tout va bien on est apaisés, on ne ressent pas le besoin. Le désir, le besoin de séduire se fait discret.
Quand on est pas bien dans sa tête on voit tout en un peu plus gris, que le couple soit responsable de l'obscurité ou qu'il n'en soit que le bouc émissaire... le couple ou la frustration de l'abstinence...
L'homme est un animal social, il a besoin de séduire.
Dans un couple trop souvent il n'y a plus cette magie. Parce qu'il n'est plus besoin de faire d'effort pour séduire. Parce c'est "gagné".
Parce que l'envie n'est plus la même.
Parce que la routine s'installe.
Si la passion n'est plus aussi vive, il reste la tendresse, l'harmonie... Ca suffit quand le soleil brille mais au moindre nuage...
C'est normal d'avoir des passages à vide.
C'est normal de penser à d'autres.
Le besoin de séduire, le besoin d'être aimé, reconnu, apprécié. L'envie de retrouver la magie de la rencontre, du jeu de la séduction, de la magie de "l'innamoramento". L'envie de construire.
De vivre.
De renaître.
Mais pourquoi, alors, est-ce que je ne prends rien pour acquis, moi ? Parce que mon homme me maintient dans un état d'attente, de doutes ?
Pourquoi est-ce que je continue malgré le temps, à envoyer des messages, des photos (de moi ou autres) à chercher différentes choses sur le plan sexuel ? (lingerie, accessoires, fantasmes...)
Pourquoi son envie part-elle ? Pourquoi ne voit-il pas la routine ? Pourquoi chercher les envies et la nouveauté ailleurs ? Pourquoi ne répond-il pas à mes tentatives de complicité ? (et si je
demande, je me fais remballer, car je suis trop pressante.)
Le problème est que la tendresse est là, mais cachée souvent.
L'harmonie ? Elle se fait discrète.
Je peux vivre et renaitre avec mon homme. Moi, je n'ai pas fait "mon temps" avec lui...
Un départ après l'amour. De la tendresse et un peu de tristesse, mais surtout de l'amour (la main dans le dos est symptomatique).
Pourquoi pas, oui...
Mais cette pose continue à m'évoquer quelqu'un qui se détourne de quelque chose, tout en ne le rejetant pas complètement. Attitude ambigüe.
Beaucoup de sensibilité, d'envies, et surtout d'amour pour cet homme qui malgré tout partage ta vie !
On ne peut qu'espérer que vous retrouviez le désir mutuel, tout comme la complicité ...