DANS L'OMBRE & SOUS LES CARESSES ...
« Puis la cousine se déshabilla. Elle tendit ses poignets à la jeune fille, qui les lia. Ensuite, la plus agée vint s'allonger en travers des genoux de l'autre. La jeune fille caressa les fesses offertes, troublée. La première claque tomba. (...) La cyprine de l'étudiante coulait sur les doigts de la jeune fille, et elle commença à gémir, le souffle court. (...) La victime fut secouée par un long orgasme, qui semblait intense.
(...) Quand elle eut finir de jouir, l'aînée s'agenouilla à terre et regarda la jeune fille avec surprise et reconnaissance. »
Le Bandeau ~ Jean-François Mopin (1)
Sans se le dire vraiment, presque une habitude, une sorte de rituel qui pourrait prendre forme (laissez moi rêver doucement... je ne fais de mal à personne, après tout), un peu comme moi avec mon chocolat chaud, le soir. Une coupure entre la lumière et les ombres, un rapprochement...
Une façon d'être ensemble, tout en gardant notre indépendance ? Chacun dans un monde imaginaire, mais côte à côte, dans le même lit. Etrangement, je sens mon homme plus présent dans ces moments-là que les fois où son esprit est pleinement ailleurs. Parce que nos deux univers se mélangent régulièrement, peut-être... Parce que nous partageons le même plaisir.
Parfois, sa main se rapproche de ma peau puis me caresse légèrement, presque distraitement. Je sens son corps si proche, nos doigts se cherchent, pour un peu de chaleur... Puis chacun repart dans ses pages.
Je me colle sagement à lui ; une sorte de "je suis là" rassurant. Mais l'air de rien, je respire son parfum, tout proche, tout en lisant... J'imagine un instant la douceur de sa peau, la tiédeur au creux de son cou, la lascivité de ses effleurements moins innocents... puis je retourne à mes mots.
Par moment, l'un de nous va lire une phrase de son livre à l'autre. Amusement, critique, question... Echanges, avant de s'endormir l'un contre l'autre.
Le roman que je lis me laisse des impressions encore confuses. (2)
L'écriture est particulière, et l'histoire, qui me semblait intéressante, n'est pas très judicieusement exploitée. Cette "jeune fille" (aucun prénom dans l'histoire) tente toutes sortes d'expériences sexuelles, et celles que j'ai préférées jusqu'ici sont un repas "à l'aveugle", puis cette scène associant bisexualité et soumission, ce qui donne une ambiance, une légère tension, un désir, un trouble...
« Elle n'avait jamais ressenti autant de plaisir. Elle voulait embrasser la jeune fille pour la remercier. Cela se voyait, mais elles n'osaient pas. Le contrat qu'elles avaient passé était sensé être impersonnel, juste pour voir. En s'embrassant, elles auraient rendu leur relation plus personnelle et se seraient senties obligées de se reconnaitre un penchant homosexuel. Elles en mouraient d'envie pourtant. »
Petite question pour grande réflexion :
"J'ai des penchants homosexuels, moi ?" (3)
Mon voisin, installé dans le moelleux de son oreiller, se tourne vers moi. Regard sérieux et intonation affirmée,
pour un simple "oui", comme une évidence.
Et juste après, il me sourit, ses yeux s'éclairent d'une
lueur d'amusement, une pointe d'impertinence... un soupçon de fierté ?
Sans lui, je n'aurais jamais été tentée, je n'aurais jamais eu l'occasion de découvrir une peau nue féminine, je n'aurais jamais osé et surtout, je n'aurais jamais pensé aimer ces caresses, ces parfums, ces sensations.
Pourtant, je n'estime pas avoir de "penchants homosexuels". Etrange, non ? C'est à peine si je conçois être bisexuelle. Pas
que je n'assume pas, au contraire.
Cette idée d'embrasser, dans le livre, m'interpelle. Ce n'est pas tant le fait
d'embrasser, mais de passer une "frontière" très personnelle dans ses valeurs. J'ai embrassé des femmes, et j'ai aimé. Il y a eu de la tendresse, même si éphémère, des émotions vraies.
Pas juste la tendresse dans les gestes, de la tendresse "en moi" aussi, ressentie, consciente.
Un sentiment
? Je n'irais pas jusque là, justement. Pourtant, ça y ressemble.
Mon histoire relève de la curiosité, teintée d'un quelque chose de plus. Une envie d'approfondir, d'aller plus loin dans la découverte. Quelque chose juste pour moi, presque égoïste, pas uniquement pour faire plaisir à mon amant ou éveiller ses appétits (comme j'ai pu le ressentir chez certains couples, l'homme sollicitant et incitant sa partenaire).
Mais l'acte seul nous rend-il bisexuels ?
La tendresse nous rend-elle bisexuels ?
Pour la jeune fille du livre, la limite est dans le baiser. Le "plus" personnel, pour moi, c'est quoi ? Je me mettrais peut-être une étiquette "bi" si je ressentais un réel besoin de femmes. Pourtant, il y a la douceur sincère, partagée.
Où me situer ? Où est ma barrière ?
Homosexuel demande une exclusivité, selon moi. Ce doit être pour ça que dans le roman, ce terme me parait inapproprié. Aimer la sensualité entre femmes ne signifie pas selon moi renier mon amour pour les hommes ; j'ai besoin de caresses masculines. Ces désirs féminins ne soulignent en aucun cas un manque. Ça ne change pas qui je suis, profondément.
Dans le roman, le comportement du personnage principal est censé être féminin, mais l'écriture pourrait trahir une plume masculine, de par ce mot trop absolu, dans mon esprit. Un peu comme un homme, affolé d'un moment d'égarement, va se dire "ça y est, je suis homo !" après avoir touché un autre homme.
... Le terme d'un auteur et le "oui" d'un homme peuvent m'emmener loin. ;)
*
Je replonge dans les lignes de monsieur Mopin, mais avant je me tourne vers le visage de mon lecteur observateur, qui sourit
toujours.
J'aime ces regards qui prennent vie, lumineux, si proches du désir.
(1) Voir ici , pour plus de
détails.
(2) Ce livre fera l'objet d'un article
prochainement.
(3) Au fil des articles, je dévoilerai ces soirées un
peu particulières.
Tout d'abord, votre blog est sensible aux majuscules. Pour les autres lecteurs, l'adresse est donc : http://web.me.com/xarnaudin/Parfums_des_Sens/Parfums_des_Sens/Parfums_des_Sens.html
J'ai rajouté ce lien dans mes favoris. Belle ambiance.
"Homosexuelle, jamais. Sexuelle toujours" : tout est dit, et joliment !
Il faut parfois du temps, pour s'épanouir. Trouver l'homme qui permettra ça. Pour ne plus avoir de tabou...
Waid : petite phrase pour inspiration... Voir " Désir, émoi... désirez-moi ". ;)
Je suis d'accord avec toi, il y a dans l'homosexualité cette notion d'exclusivité qui fait toute la différence avec la bisexualité.
Cette peur de se sentir tout à coup homosexuel(le) n'est pas rare, dès que l'on a franchi le pas.
Le baiser demeure quelque chose de très particulier, surtout entre hommes. Ce n'est pas évident je trouve de s'abandonner à ce qui est tout de même très intime ...
Longtemps, je n'ai pas du tout été attirée par les femmes... Désintéressement total. C'est venu tardivement. Un peu un déclic. C'est venu naturellement, surtout, dans une ambiance, un moment précis.
J'ai par contre encore du mal, à imaginer "le baiser entre hommes" (même si je suis sûre que je le trouverais très érotique), je conçois que ça soit un engagement plus profond. J'ai l'impression qu'entre deux femmes, c'est bien souvent le "début". Je peux me tromper, ceci dit.
Mais j'ai toujours trouvé le baiser moins intime que ce qui peut suivre... Le baiser est une introduction à de beaux moments. Enfin, moi je trouve que j'ai fait des choses plus intimes, par la suite, avec ces femmes. ;)
C'est juste du plaisir. Donner, sans se soucier du sexe de la personne.
Tendres baisers
Heureuse de partager ces questions ici... :)
Quelque chose que j'aurais été incapable de faire, il y a cinq ans encore. J'aime voir le chemin parcouru.
Quand on est libre pourquoi n'aurions nous pas des envies et pourquoi ne les assumerions nous pas alors même qu'il est assez généralement reconnu que tout le monde a une petite tendance à... plus ou moins avouée.
Maintenant je trouve que les pensées homosexuelles sont mieux acceptées, plus "logiques", tout simplement parce que dans les rapports entre femmes il n'y a pas le même aspect psycholiquement destructeur.
Deux femmes (indépendamment du fantasme masculin éventuel) c'est de la tendresse, une relation d'égal à égal.
Deux hommes c'est implicitement un mâle et un qui ne l'est plus, c'est honteux, humiliant, sale... Un homosexuel n'est plus un Homme pour ses congénères...
Moins accepté, plus caché, plus sensuel ou plus sexuel...
Après il y a homosexualité et homosexualité.
Pour ma part j'aurais tendance à dire qu'il y a les homos, les bi et les "curious", cette dernière catégorie étant tout à fait disposée à faire l'amour avec quelqu'un du même sexe mais étant théoriquement incapable d'avoir une relation amoureuse autre qu'hétérosexuelle.
Bref des envies on en a.
On franchit le pas ou non, par accident ou pas... Personnellement je ne vois aucune raison de le regretter ;)
Peut-être que le secret est dans la liberté, oui. Etre bien dans son corps...
Il y a quelques années, jamais je n'aurais imaginé être attirée par une femme, être curieuse de ce monde-là. Mais je n'avais aucune liberté. J'étais juste coincée dans un schéma banal, convenu, très moral.
A part ça, il doit aussi y avoir des relations sortant de l'image établie, avec des femmes dominantes, et des hommes tendres. ;)
Elle m'a dit oui, une envie. elle m'a parlé longtemps d'une de ses amis, d'une soirée entre fille, de sous-entendus dans les propos de cette amie. Mais c'était avant moi. avant notre rencontre. avant qu'elle n'assume une sexualité sans tabou, où le plaisir est au centre de la relation. Pas l'hygiène. Pas l'obligation conjugale.
Alors elle m'avoue, qu'aujourd'hui, maintenant, désormais, elle pourrait embrasser cette amie, et plus. Qu'elle a envie d'un corps de femme contre elle. Parce qu'elle aime mes caresses. Qu'elle aime mon corps. Qu'elle aime la façon dont je l'aime. dont je touche son corps.
Homosexuelle, jamais. Sexuelle toujours.